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La force de la vulnérabilité. Esaïe 12,1-6 Joachim Trogolo

Esaïe 12 1-6_Trad. Bayard
Joachim Trogolo
180922 Prédication Paroisse réformée d’Illzach

Version PDF : Prédication_180922_Esaïe 12. 1-6_Temple réformé d’Illzach_Joachim Trogolo

Tu diras, ce jour-là : je t’acclame, Yhwh qui souffla contre moi – ta tempête retombe tu m’apaises – voici Dieu, mon issue, ma confiance – plus d’effroi – oui ma force, mon chant c’est Yah, c’est Yhwh pour moi c’est lui l’issue – vous puiserez, puiserez l’eau dans la joie aux sources vous trouverez l’issue – vous direz, ce jour-là : acclamez Yhwh, criez son nom exposez aux peuples ses faits rappelez comme son nom est haut – des chants pour Yhwh ! oui il accomplit des hauts faits qui sait toute la terre – acclame, chante et crie population de Sion comme il est en ton sein grand, le Saint Israël
[Esaïe. 12 1-6_Trad. Bayard]

La force de la vulnérabilité

« Voici Dieu, mon issue, ma confiance.
– Plus d’effroi –
Alors que le prophète crie la souffrance de son peuple, la tempête s’apaise… Pour une joie surprenante retrouvée… Enfin retrouvée…

Dans ce passage du livre d’Esaïe peut-être nous est-il donné à entendre la trace d’une expérience… La sienne, qui pourrait fort bien rejoindre la nôtre…
De quelle expérience pourrait-il s’agir ?
Je vous propose de nous laisser aller au voyage… Et de faire un bond dans le temps pour rejoindre les terres lointaines d’Israël il y a près de 2500 ans…

1. Le second désert
Se croyant puissante et invulnérable, Israël sombre dans l’effroi… Les armées du roi babylonien Nabuchodonosor II envahissent progressivement la terre sainte. Jérusalem, capitale du peuple de Dieu, est vaincue : le Temple – lieu privilégié de rencontre avec Dieu – est d’abord pillé puis définitivement détruit par l’envahisseur… C’est l’effondrement tous leurs repères… Le peuple est condamné à l’exil bien loin du lieu qui l’aura vu naître… En terre étrangère et hostile…
Pendant près de 40 années de désert : c’est l’errance, la désespérance… Et aujourd’hui se donne à entendre le cri victorieux d’Esaïe : un cri de reconnaissance pour une liberté retrouvée… Enfin retrouvée… La tempête, terrible, s’est apaisée… Les hébreux sont, une seconde fois, libérés de leur captivité… Retrouvant leur terre, ils reconstruisent et se réinventent dans une Jérusalem nouvelle : après la désespérance, c’est l’expérience de la Paix retrouvée… Enfin retrouvée… Les hébreux renaissent et reconstruisent leur maison, leur identité, leur spiritualité… Après être tombé, le peuple de Dieu, est comme relevé… Ressuscité…
Ce jour-là, plus d’effroi – la tempête est passée… Une joie surprenante s’est profondément installée… Pour une Paix enfin retrouvée…

2. L’expérience du vide
Tout comme Jésus qui éprouva le désert pendant 40 jours, le peuple d’Israël connaitra l’errance pendant près de 40 années : un chiffre qui, dans le texte biblique, symbolise le temps de l’épreuve intérieure… Du silence et de l’absence… Du vide qu’il est parfois si difficile à vivre et à côtoyer… Et paradoxalement, du cœur duquel, peut surgir une force étonnante et surtout vivante…
Cette expérience très humaine semble être relatée par nombre d’êtres humains, dans la Bible et hors la Bible… Consentir au vide et aux émotions qui traversent et parfois blessent… A l’écoute d’une Parole qui peut nous rejoindre profondément et qui encourage chacune et chacun d’entre-nous à vivre vraiment nos émotions, dans nos joies comme dans nos tempêtes intérieures… A oser les vivre et les exprimer, pour une Paix, toujours étonnante, enfin retrouvée… « Quand je suis faible alors oui je suis fort » écrira Paul après Esaïe…
La vulnérabilité reçue, contactée et exprimée est devenue paradoxalement « force » « partagée »… Pour des relations véritablement réconciliées…
N’est-ce pas cela aussi « ressusciter » ?

Prions…
« Seigneur que savons-nous de Ton accueil tant que nous ne déchargeons pas sur Toi nos fardeaux, tant que nous ne Te confions pas nos infirmités, à Toi qui es venu les porter ? S’il est vrai que Tu nous prends tels que nous sommes, s’il est vrai que Tu reçois avec tendresse tous les paysages de nos vies, leurs crevasses et leurs sommets, leurs volcans et leurs déserts, s’il est vrai que Tu nous ouvres les bras quels que soient nos sentiments d’échec ou de lassitude, alors, Seigneur, Tu nous délivres de nous-mêmes : là où nous sommes le plus vulnérables, là s’enracine une force venue de Toi pour recevoir notre prochain tel qu’il est, lui offrir de l’ombre, la possibilité de faire halte, de se remettre des fatigues du voyage… Seigneur, apprends-nous l’accueil du fond de l’âme, l’accueil d’autrui en cette profondeur du partage qui se passe de grandes démonstrations, l’accueil d’autrui en ce lieu à part de la prière que tu creuses en nous quand nous prenons conscience de Toi ! »