Au commencement était une marionnette de bois, ou de glaise. Appelons-la Pinocchio, Adam, ou Eve. Son créateur aima tellement son œuvre qu’il lui donna la plus grande preuve d’amour qui soit : la liberté. Dès lors la créature sut penser et se mouvoir par elle-même. Elle était devenue “animée”. Et surtout très curieuse.
Depuis ce jour elle ne cessa plus de se poser des questions. La première sera celle de son origine : quel est cet ingrédient infusé en moi qui me différencie d’un bout de bois ou de la terre inerte ? Elle nommera cette différence “l’âme”, c’est-à-dire : “ce qui m’anime”. Et puis elle s’interrogera : l’âme peut-elle se dissocier de mon corps ? En ressortir comme elle y est entrée ? Quand le corps mourra, l’âme lui survivra-t-elle ou s’éteindra-t-elle aussi ? Migrera-t-elle dans un nouveau corps ? Sommeillera-t-elle ? Hantera-t-elle le monde des vivants comme un fantôme ? Ressuscitera-t-elle à la fin des temps ?
Deux camps principaux se dessineront.
– A ma gauche le camp dualiste, influencé par la philosophie grecque, qui affirmera que l’âme et le corps sont deux choses distinctes. Que le corps serait le geôlier de l’âme qui n’aspire qu’à s’en libérer. Dans cette optique, au début du XXème un médecin affirmera qu’il avait réussi à peser l’âme de défunts et qu’elle pesait 21 grammes.
– A ma droite la tradition biblique pour qui il n’y a ni âme sans corps ni corps sans âme. L’âme est le “nefesh” (souffle en hébreu) ou “psychè” (esprit en grec) du corps. Elle est la qualité qui fait du corps un « roseau pensant » selon l’expression de Blaise Pascal et non pas une substance ou une personne en soi. Elle est ce mystère de la conscience d’être apparu dans le genre « homo » il y a environ 2,5 millions d’années selon la paléoanthropologie.
Mais la meilleure définition de l’âme n’est-elle pas celle donnée au commencement, de Pinocchio, d’Adam ou d’Eve ?
L’âme est la dignité donnée à chaque être vivant parce qu’il est né de l’amour de son créateur et rendu capable d’aimer à son tour. Au contraire du Playmobil dépourvu d’âme car il ne sait pas aimer. Lorsque Jésus disait “ils peuvent tuer le corps mais pas l’âme”, nous pouvons comprendre : « personne ne pourra vous retirer le fait que vous soyez nés d’un acte d’amour ».
Nous pourrions le dire encore ainsi :
l’âme est la noblesse des êtres a(n)imés dont a retiré la “n” (haine). Aimés !
Jean-Mathieu Thallinger, pasteur de la Dynamique Mulhousienne